La misogynie (haine des femmes) devrait être reconnue comme crime de haine, au même titre que le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie, etc. car elle conduit à violenter et à tuer les femmes parce qu’elles sont femmes.
Malheureusement, dans le monde entier, la misogynie est ignorée, considérée comme banale, normale, voire amusante, alors que cette haine des femmes est responsable d’un nombre phénoménal de victimes (féminicides, violences conjugales, violences sexuelles, etc.). Le nombre de victimes de la misogynie dépasse même largement le nombre de victimes de tous les autres crimes de haine confondus, puisque les femmes constituent la moitié de la population mondiale et que le taux de violences envers elles est très élevé. Autrement dit, la misogynie est le crime de haine à la fois le plus répandu et le plus nié.
Depuis peu, le Royaume-Uni a néanmoins entrepris de reconnaître la misogynie comme crime de haine. Que ce précurseur en la matière en soit remercié, pour toutes les femmes violentées et tuées parce qu’elles sont femmes. On doit notamment cette initiative à l’engagement de nombreuses femmes (des députées, par exemple).
Nottinghamshire
Tout a commencé en juillet 2016 dans le comté du Nottinghamshire où un projet pilote a été mis en place pour requalifier les agressions misogynes en crimes de haine.
En septembre 2016, Les Terriennes (TV5 Monde) publiaient un article à ce sujet :
« En juillet 2016, les autorités du Nottinghamshire ont décidé de requalifier les agressions misogynes en crimes de haine. Une première au Royaume-Uni. (…)
Quand les agressions misogynes sont considérées comme des crimes de haine
Tout a commencé dans le Nottinghamshire, une région britannique au centre de l’Angleterre. En juillet 2016, après deux années d’enquête, d’échange avec les associations locales et de rencontres avec les victimes, les autorités décident de faire paraître une ordonnance pour requalifier les agressions misogynes en crimes de haine. Ils entrent dorénavant dans la même catégorie que les agressions à caractère racial, religieux, à cause d’un handicap, d’une orientation sexuelle ou d’une nationalité.
Dans une vidéo réalisée par la police de Nottingham, des femmes témoignent du harcèlement de rue quotidien. (Vidéo en anglais) (…)
La police de la région a annoncé que ces nouveaux crimes de haine recouvraient les « incidents contre des femmes qui résultent d’une certaine attitude d’un homme envers une femme, et (…) tout comportement adopté par un homme face à une femme simplement parce qu’elle est une femme » selon The Independant. Rentrent dans cette catégorie les « approches physiques non désirées » ainsi que le fait de « contacter et engager verbalement une femme sans y avoir été invité », selon le site d’information de BFM.
Qu’est ce que ça change ?
« Il est important de comprendre que ce changement de législation ne reconnaît aucun nouveau crime. Les peines encourues sont les mêmes […] Cette requalification permet essentiellement de prendre conscience de l’illégalité de ces actes et d’encourager les victimes à porter plainte. […] Les policiers de Nottingham ont reçu une formation spéciale pour recevoir les plaintes liées à ces crimes de haine misogynes. » explique Heather à Terriennes. Elle est la représentante de l’association Hollaback, qui lutte contre le harcèlement de rue.
Et il semblerait que la requalification ait porté ses fruits. Dave Alton, responsable de la police de Nottingham cité par le l’association Hollaback, explique que les résultats sont plutôt positifs : « le fait de savoir que leur plainte sera prise au sérieux fait que les femmes qui ne seraient jamais venues il y a six mois osent venir ».
Violences misogynes en Angleterre et au Pays de Galles, quelques chiffres:
Une étude menée par l’Office of National Statistics et citée par l’organisation féministe Rape Crisis England & Wales avance les chiffres suivants concernant les violences sexuelles en Angleterre et au Pays de Galles, en 2013 :
– 11 viols (sur des adultes) sont commis toutes les heures,
– 1 femme sur 5 âgée entre 16 et 59 ans a été victime d’une forme de violence sexuelle depuis ses 16 ans,
– Seulement 15% d’entre elles ont porté plainte
Un sondage en ligne a révélé que 95% des femmes anglaises se sont faites harcelées, raillées ou ont été la cible de remarques obscènes dans la rue. C’est ce qu’explique Sarah Teale dans un reportage à Nottingham en septembre 2015, avant d’être elle même victime de harcèlement de rue, devant la caméra. (Vidéo en anglais) » (Cherrid, 2016)
Capture écran de la vidéo
donnée en lien dans l’article ci-dessus
Source image : Cherrid, 2016
Melanie Onn, députée travailliste
En mars 2018, plusieurs députées viennent de relancer le débat. Melanie Onn, députée travailliste, propose de promulguer une loi au niveau national pour reconnaître la misogynie comme crime de haine.
« A recent pilot scheme by Nottinghamshire police treats misogynistic acts as hate crimes. Such acts are defined as “incidents against women that are motivated by an attitude of a man towards a woman and includes behaviour targeted towards a woman by men simply because they are a woman”.
In the first eight months of the scheme in 2016, 79 misogynistic acts were recorded, 31 of which were categorised as hate crimes. » (Elgot, 2018)
Traduction : « Un projet pilote récent de la police de Nottinghamshire traite les actes misogynes comme des crimes de haine. De tels actes sont définis comme des « incidents contre des femmes qui sont motivés par une attitude d’un homme envers une femme et incluent un comportement ciblé envers une femme par des hommes simplement parce qu’elles sont une femme ».
Au cours des huit premiers mois du programme en 2016, 79 actes misogynes ont été enregistrés, dont 31 ont été classés comme crimes de haine. »
Source image : Elgot, 2018
Mhairi Black, députée écossaise
En Ecosse, la députée Mhairi Black propose aussi de reconnaître la misogynie comme crime de haine en Écosse. Voici la vidéo d’une de ses interventions : Mhairi Black’s Speech on misogyny as a Hate Crime
Capture d’écran de la vidéo
Descriptif de la vidéo :
« Mhairi Black delivers a passionate speech regarding the everyday abuse she receives online. She also makes history by becoming the first ever MP to use the c-word in Parliament. » (Aye For Scotland, 2018)
Traduction : « Mhairi Black livre un discours passionné sur le harcèlement quotidiens qu’elle reçoit en ligne. Elle a également marqué l’histoire en devenant la toute première députée à utiliser le c-word [le mot « cunt » qui signifie «con, vagin»] au Parlement. »
Bibliographie
Aye For Scotland. (2018). Mhairi Black’s Speech on misogyny as a Hate Crime [vidéo]. Youtube [en ligne]. 7 mars 2018 [consulté le 6 avril 2018]. Disponible à l’adresse : https://www.youtube.com/watch?v=cG9tpVr2KeI&feature=youtu.be
Cherrid, Margot. (2016). La misogynie bientôt considérée comme crime de haine au Royaume-Uni ?, TV5 Monde, Les Terriennes [en ligne]. 29 septembre 2016 [consulté le 7 avril 2018]. Disponible à l’adresse : https://information.tv5monde.com/terriennes/la-mysoginie-bientot-consideree-comme-crime-de-haine-au-royaume-uni-128610
Elgot, Jessica. (2018). Make catcalling a hate crime, Labour MP to urge parliament, The Guardian [en ligne]. 6 mars 2018 [consulté le 6 avril 2018]. Disponible à l’adresse : https://www.theguardian.com/world/2018/mar/06/make-catcalling-a-hate-crime-labour-mp-to-urge-parliament